Le Centre Catholique de l’Inquisition
Par le Dr Elie Abouaoun
Chargé de Cours à l’Université Saint Joseph
Enseignant vacataire à l’Université Notre Dame Louaize
Publié dans l'Orient le Jour (Quotidien francophone Libanais) - février 2013
Pour certains, Il n’est
probablement pas étrange que le néo inquisiteur RP Abdo Abou Kassam jette
l’anathème sur ceux qui optent pour le mariage civil. Ca fait des années que
des activistes, chrétiens de surcroît,
se posent des questions (parfois dans ces colonnes même à l’instar de Michel
Hajji Georgiou) sur la pertinence d’avoir un centre chargé de la moralité de la
communauté. Sur le Fond, « décider », que les mariés civils n’ont pas
droit aux Sacrements de l’Eglise n’est que le comble d’une hérésie qui doit
cesser. J’espère de tout cœur que les jeunes catholiques sauront mesurer le
danger de ce genre de pratiques et prendre position.
Le CCI (ou Centre Catholique de
l’Inquisition) s’est fait champion de la censure depuis bien longtemps. A ce
titre, il s’est arrogé le droit de décider ce que les Chrétiens du Liban
doivent lire, voir ou écouter. A défaut d’une résistance culturelle structurée
au sein même de la communauté - que le CCI considère comme sa chasse gardée -, ces
néo-inquisiteurs reviennent maintenant avec une « Fatwa » bien plus
grave : celle de décider qui a accès aux Sacrements du Christ. Que ce
genre de jugement soit pris à la légère (normalement l’ex-communion relève de
l’autorité d’un Evêque) et communiqué de cette façon cavalière ne fait que
pousser les croyants à se poser de plus en plus de questions sur la compétence
des gens en charge des fonctions ecclésiastiques sensibles. Mais l’histoire va
au-delà des compétences : c’est une question de principe. Qui est en droit
de juger les croyants et comment ? Qui est en droit de décider pour toute
une communauté ce qui est « moral » et ce qui ne l’est pas ?
Tout d’abord, il y a lieu de rappeler, à ceux dont la mémoire est courte, ce que le Christ lui-même a dit : « Ne jugez pas, afin de n'être pas jugés »
(Mathieu 7 :1). Il n'y a en tout cas aucune source
biblique pour la procédure d'ex-communion. Et le fait de substituer cette
absence de source biblique par un dogmatisme rigide ou un juridisme
obscurantiste contredit la nécessité que, sur ces questions éthiques, l'Eglise
catholique parte toujours d’un ensemble de principes au lieu de tomber dans le piège de la
néo-inquisition. L’Eglise, engagée au service des droits universels de l’Etre
Humain, de la liberté de conscience et, par-dessus tout, au fait que la
religion chrétienne est basée sur le principe de la liberté du Croyant et
la centralité de sa dignité aux yeux du Créateur ne peut pas permettre à un
prêtre de s’arroger la fonction de « censeur ». A travers ces
pratiques, le CCI éloigne l’Eglise des principes fondateurs de la religion
Chrétienne et, surtout, augmente la faille déjà existante entre les Croyants et
l’Establishment ecclésiastique. A ce
titre, l’Assemblée des Patriarches et Evêques Catholiques du Liban est appelée
à redéfinir le rôle et la fonction du CCI de façon à neutraliser cette tendance liberticide observée depuis
plusieurs années.
C’est à se demander si le CCI me permettra d’aller
dimanche à la Messe après la publication de cet article.
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